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Dans la région de Diourbel, plus la moitié des cas de malnutrition proviennent du district de Touba. Un département assujetti à la pauvreté et à une forte analphabétisation qui rend difficile l’accès à la communication pour un changement de comportement. Il s’y ajoute, dans la région de Diourbel, la non diversification de l’agriculture qui joue sur la qualité de l’alimentation des enfants souvent nourris de bouillie non enrichie mais aussi sur la santé des femmes enceintes. Les autres districts touchés par la malnutrition restent celui de Bambey et de Diourbel même.
Dans le cadre d’une caravane sur la malnutrition des enfants, l’Association des journalistes en santé population et développement, en partenariat avec la fondation Gates, s’est rendue dans la région de Diourbel du 14 au 17 juillet dernier afin de documenter ce fléau qui prend de l’ampleur dans cette zone mais aussi pour porter la sensibilisation pour une meilleure prise en charge et une implication active des acteurs de la lutte contre la malnutrition. Dans cette région située au centre du Sénégal, la malnutrition est très active. La prévalence est au-dessus de la moyenne nationale avec 17,1%, contre 10%. Les cas de malnutrition notés concernent la malnutrition aiguë prise en charge dans les structures de santé. Selon le directeur régional de la santé Dr Dieng, dans la région de Diourbel, tous les indicateurs qui concourent à la malnutrition sont au bas par rapport à la référence nationale. Prenant exemple sur le retard de croissance, Diourbel affiche 17% contre 14, 3% au niveau national, l’insuffisance pondérale se situe à 22, 3 % contre 16% tandis que l’allaitement maternel exclusif est inférieur à 30% contre 34%. Les facteurs explicatifs de cette tendance baissière peuvent s’expliquer, selon les acteurs, par le fait que Diourbel traverse des périodes de sécheresse. « Diourbel est une région sahélienne exposée à des sécheresses fréquentes. Ces épisodes affectent considérablement la production agricole, affectant la disponibilité des aliments de base. Cela entraîne une insécurité alimentaire chronique, surtout chez les populations rurales », a fait remarquer le chef du Bureau régional pour l’éducation et l’information pour la santé (BREIPS), Mame Bousso Amar. Dans la région de Diourbel, chef-lieu du Mouridisme, l’agriculture n’est pas diversifiée. Seule l’arachide y est cultivée en période hivernale. « L’économie de Diourbel repose largement sur la culture de l’arachide. Cette dépendance compromet la sécurité nutritionnelle avec peu de fruits, légumes ou sources de protéines variées dans les régimes locaux. En cas de mauvaises récoltes ou de baisse des prix, les revenus baissent et la malnutrition augmente » à-elle relevé.
Touba, une pauvreté accrue
Le district de Touba enregistre plus de la moitié des cas de la région médicale de Diourbel. En visite dans cette structure, les acteurs de la santé ont confirmé la forte prévalence dans cette zone. Selon Yacine Fall Lo, responsable des soins de santé primaires, la malnutrition touche les enfants de 0 à 5 ans et la prise en charge se fait sur place à travers les structures de santé existantes dans la zone. Citant une étude faite par un praticien de la localité, elle a avancé qu’en 2021, l’incidence était à 6,11% à Touba, en 2022 à 3,81%, en 2023 à 5,96% et en 2024 à 3,17%. Une évolution en dent de scie qui témoigne du caractère endémique de la malnutrition à Touba. Pour Mme Lô, ces chiffres sont à prendre avec prudence à cause de la rétention d’information notée dans le pays pendant plusieurs années. Revenant sur les déterminants, elle a déclaré : « la population n’est pas avertie sur les procédures de tenir un bébé, c’est-à-dire sur l’alimentation du bébé. L’allaitement maternel exclusif n’est pas respecté. Les femmes introduisent d’autres aliments comme l’eau, la bouillie avant l’âge de six mois alors que l’enfant doit être nourri exclusivement au sein. D’autres donnent uniquement du sein à leur enfant même après six mois alors qu’ils ont besoin d’autres nutriments en plus du lait maternel pour leur croissance ». Et d’ajouter : « en plus de la pauvreté, il ya le sevrage précoce qui fait basculer l’enfant dans la malnutrition sans compter les réalités culturelles ».
Dans le quartier de Bambey, le tableau est identique même si on n’a pas les chiffres pour étayer nos propositions. Ce département partage les mêmes réalités que le reste de la région de Diourbel selon les responsables de santé. Une grande partie de la population vit sur le seuil de la pauvreté. Assurer les trois repas quotidiens pour sa progéniture devient un véritable parcours de combattant. La plupart des enfants sont confiés aux belles-mères ou aux tantes par leurs mères pour des lendemains meilleurs vers d’autres horizons comme Dakar et autres. La plupart est sevrée avant même l’âge recommandé de 2ans. Les grossesses rapprochées en sont aussi un des facteurs déterminants de la malnutrition des enfants souvent nourris avec du lait artificiel non recommandé pour l’enfant. « Bambey fait partie des départements les plus pauvres du Sénégal. Les pathologies liées à la pauvreté y sont très fréquentes », a fait savoir le Dr Marieme Maty Dioum, médecin-chef adjoint du district de Bambey.
La prise en charge de la malnutrition à Diourbel
Dans le cadre de la prise en charge de la malnutrition, aucune référence n’est notée dans la région. Elle se fait dans chaque district selon le protocole établi par le ministère de la Santé et de l’action sociale pour soigner la malnutrition. Les enfants malnutris sont supplémentés en vitamines A et en dotations de céréales après leur entrée en cuisine. La détection des cas se fait au niveau communautaire, dans les structures de santé pendant les séances de pesées, les consultations prénatales ou encore lors des stratégies avancées tenues au sein de la communauté dans le cadre de la vaccination et autres, évaluent les acteurs de la santé. « La prise en charge est multisectorielle. Nous avons des centres de réhabilitation nutritionnelle éducative (Cren) pour la prise en charge pour les cas de la malnutrition sévère avec complication, ceux modérés sont traités dans la communauté au sein des cas de santé et enfin les cas sévères sans complication sont pris en charge par le programme Pecmas mis en place en œuvre avec l’appui de Hellen Keller international », fait savoir Dr Dioum.
Dans le cadre de cette prise en charge, le traitement est de deux mois. L’enfant reçoit chaque jour un sachet de compléments alimentaires sous forme de lait appelé Nutributter plus. Au-delà de deux mois, s’il n’y pas une évolution rassurante, des investigations sont faites par les médecins à la recherche d’autres causes. Ce qui explique que des enfants malnutris peuvent être suivis même au-delà de six mois avant d’être guéris selon le personnel soignant.
Des mères et des enfants en souffrance
Les centres de réhabilitation nutritionnelle sont implantés dans les structures de santé. Au sein du district de Diourbel, les pleurs des enfants attirent l’attention. Sur le lit d’hôpital en compagnie de leurs parents, le regard frêle, corps chétif, ces derniers luttent pour survivre. Les médicaments et les dotations en farine enrichissent la vie. A coté de cette souffrance, les parents sont épuisés. Des mamans sont obligées de faire chaque jour des kilomètres pour amener leur enfant dans ces structures. Même si la prise en charge de la malnutrition est gratuite, les frais de transport sont à la charge des parents. Dans cette situation compliquée, une seule chose vaille : la santé de sa progéniture. Mariama Ndiaye est une mère. Son enfant a été déclaré malnutri. Avec le traitement, elle a senti une nette. Son enfant s’alimente et commence à retrouver sa bonne humeur. « Il était pleurnichard. Mon enfant refusait de manger. Il ne faisait que la tétée et consommait du sucré et c’est lors d’une campagne de dépistage sur la malnutrition qu’on l’a détecté et depuis deux mois il est suivi dans ce centre. Aujourd’hui, je rend grâce à Dieu » at-elle soutenue. Dans les autres districts, des témoignages de mères d’enfants malnutris et suivis ont été recueillis. Si certaines parlent de fragilité qui ne leur permettait pas d’avoir un lait de qualité pour bien nourrir leurs enfants, la majorité est dans l’impossibilité de révéler les causes de cette malnutrition. Toutefois, elles estiment que le traitement fait ses effets et que les enfants retrouvent leur forme et leur bonne humeur.
DENISE ZAROUR MEDANG
L’article Malnutrition des enfants dans la région médicale de Diourbel : Touba, épicentre de la crise est apparu en premier sur Sud Quotidien.