Posted by - Senbookpro KAAYXOL -
on - Aug 3 -
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Une révolution silencieuse prend forme : la finance islamique, longtemps cantonnée aux pays du Golfe, s’installe progressivement dans le paysage financier marocain. Derrière les chiffres et les statistiques se cachent des contradictions majeures, des choix de vie qui interrogent notre rapport à l’argent et à l’éthique.
Fondée sur des principes religieux — l’interdiction de l’intérêt (riba) et des transactions spéculatives — cette forme de finance séduit de plus en plus de Marocains en quête d’éthique et d’alignement spirituel. Mais entre promesses et défis, le système fait encore face à des vents contraires. Depuis l’autorisation des premières banques participatives en 2017, le secteur a franchi des étapes importantes. En sept ans, cinq établissements bancaires se sont implantés, attirant près de 35 milliards de dirhams en crédits, principalement dans le financement immobilier. Une tendance qui en dit long sur la confiance que place une frange de la population dans ce modèle.
« Je me suis tourné vers la banque participative pour l’achat de mon appartement, parce que je voulais éviter les intérêts usuriers. C’est une décision en accord avec mes convictions religieuses », confie Amine*, un jeune cadre de Rabat. Comme lui, ils sont des milliers à considérer cette alternative comme plus juste et transparente.
Malgré cet engouement, les banques participatives ne représentent que 2 % des actifs totaux du système bancaire marocain, dont l’envergure avoisine 1.900 milliards de dirhams. Pourtant, selon Bank Al-Maghrib, le secteur enregistre une croissance annuelle de plus de 15 % dans certains segments, notamment l’immobilier. Un rythme soutenu mais insuffisant pour franchir un seuil critique et prétendre à une transformation de fond.
Le développement de la finance participative reste entravé par plusieurs facteurs : manque de liquidité, absence d’un marché monétaire parallèle, retard dans la mise en œuvre de produits complémentaires tels que les assurances takaful ou les obligations islamiques (sukuk). Depuis 2018, un seul sukuk souverain a été émis, malgré son rôle stratégique dans le soutien à la liquidité du secteur.
Toutefois, le Royaume envisage de lancer d’ici la fin de l’année une émission d’obligations islamiques, marquant ainsi un retour après sept ans d’absence sur ce marché. Cette démarche s’inscrit dans une stratégie plus large de développement de la finance participative, en lien avec les ambitions d’investissement liées notamment à la Coupe du monde 2030.
L’annonce en a été faite par le gouverneur de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri à l’agence Bloomberg en marge du 23ᵉ Forum sur la Stabilité Financière Islamique tenu début juillet à Rabat, notant néanmoins que le choix de la devise — dirham local ou devise étrangère — n’a pas été fixé pour le moment.
Selon le gouverneur de BAM, plusieurs freins ralentissent le développement de la finance islamique au Maroc. Parmi ceux-ci figurent notamment un manque de liquidité ainsi que des lenteurs administratives et réglementaires, notamment pour les procédures d’autorisation des nouveaux produits financiers. Pourtant, les fondations réglementaires ont été posées, et les autorités s’attellent désormais à identifier et lever les obstacles restants.
« Sans un véritable écosystème, la banque islamique restera un modèle bancal. On ne peut pas parler de finance islamique sans développer le reste de ses composantes », affirme notre interlocuteur sous couvert d’anonymat, précisant avoir choisi ce modèle par conviction religieuse.
À côté des adeptes, les sceptiques ne manquent pas. Certains dénoncent un « marketing religieux » déconnecté des réalités économiques. « Les produits sont parfois plus chers que ceux des banques classiques, et la transparence n’est pas toujours au rendez-vous. Le risque est de tromper le consommateur sous couvert de religion », critique Safae, employée à Casablanca, qui avait envisagé un crédit participatif avant d’y renoncer.
D’autres pointent l’absence de volonté politique claire. Si des réformes légales ont bien été introduites, les spécialistes estiment qu’elles ne suffisent pas. « Le secteur a besoin d’un appui fort de l’État pour structurer un véritable marché parallèle compatible avec la charia. Cela suppose de la vision, de la régulation et surtout des investissements », martèlent ils.
À l’horizon 2030, le Maroc se prépare à accueillir la Coupe du Monde de football, ce qui implique des milliards d’investissements en infrastructures. Les banques participatives pourraient y jouer un rôle si des mécanismes adaptés sont mis en place : leasing, participation au capital, sukuk d’infrastructure… autant d’outils qui peuvent répondre aux besoins du développement national sans transgresser les principes religieux.
Par ailleurs, l’un des plus grands défis du secteur réside dans la transformation numérique. Pour séduire la jeune génération, les banques participatives devront accélérer leur transition digitale : applications mobiles, banques en ligne, services innovants… tout en restant conformes à la charia. Un équilibre délicat à atteindre.
La banque islamique au Maroc ne manque pas d’arguments ni d’adhérents, mais sa pérennité dépendra de sa capacité à sortir de sa marginalité actuelle. Il faudra du temps, des réformes courageuses et surtout une volonté politique affirmée. En attendant, elle continue de faire son chemin, entre conviction spirituelle et prudence économique.
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