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Dans les districts de Koumpentoum et de Kidira, relevant de la direction régionale de la santé de Tambacounda, à l’Est du Sénégal, donner naissance relève parfois du parcours du combattant. Les conditions de travail des agents de santé, tout comme celles des femmes en âge de procréer, plongent dans la stupeur et suscitent la compassion. Dans nombre de postes de santé, les équipes soignantes peinent à prendre en charge les urgences obstétricales, faute de moyens et d’infrastructures adaptées.
Les difficultés sont multiples : bâtiments délabrés, absence d’ambulances, routes impraticables, et grandes distances entre les postes de santé et les centres de référence. Pourtant, malgré ce quotidien éprouvant, les soignants continuent de réaliser des performances notables grâce aux stratégies dites « avancées ».
Du 28 au 31 juillet, une caravane de presse initiée par l’Association des journalistes en santé et développement (Ajspd), en partenariat avec la Direction de la santé de la mère et de l’enfant (Dsme), a sillonné les deux districts afin de renforcer le plaidoyer et la sensibilisation autour de la stratégie Srmania-N, pour une meilleure prise en charge de la santé maternelle, néonatale et adolescente. Si des avancées sont visibles dans les zones visitées, la précarité des postes de santé reste un frein majeur aux objectifs visés.
Dans les centres de santé dotés de blocs opératoires pour les urgences obstétricales, le plaidoyer se poursuit pour la mise en place de services de néonatologie. À Koumpentoum, le centre de santé dessert 24 postes et 33 cases de santé. Toutes les évacuations y sont dirigées. « Nous avons un bloc opératoire fonctionnel, deux médecins formés en soins obstétricaux d’urgence (SOU) et un anesthésiste. Mais pour d’autres urgences, nous devons référer les patientes à l’hôpital régional, car certains actes chirurgicaux dépassent notre plateau technique. Et nous n’avons pas de service de néonatologie, donc lorsqu’un nouveau-né nécessite des soins immédiats, nous devons également l’évacuer vers Tambacounda », explique le Dr Siré Sagna, médecin-chef de district. Elle déplore par ailleurs l’éloignement de certains postes de santé et l’état dégradé des routes, surtout en période d’hivernage, qui allongent dangereusement les délais d’intervention.
Les deux médecins-chefs identifient cinq causes majeures de référence vers le niveau central : dystocie, prééclampsie, éclampsie, avortement et anémie. À Kidira, 50 femmes ont été transférées à l’hôpital régional de Tambacounda, situé à 193 km, rien que durant le premier semestre de 2025, selon le Dr Saliou Gningue. À Koumpentoum, ce sont 23 évacuations recensées pour les mêmes pathologies.
Face à cette réalité, le combat pour un système de santé maternelle plus équitable continue, au prix d’une abnégation silencieuse des soignants et de la patience résignée des patientes
Des postes de santé non fonctionnel, certains dépourvus d’infirmiers ou de sages-femmes
Dans les districts sanitaires de Koumpentoum et de Kidira, la charge de travail des médecins-chefs est alourdie par l’éloignement des structures sanitaires et de certaines zones d’habitation. Mais au-delà de l’enclavement, c’est surtout le déficit en personnel qui handicape gravement la prise en charge. De nombreux postes de santé sont non fonctionnels, faute d’agents ou de locaux adaptés. D’autres tournent tant bien que mal avec un unique infirmier ou une seule sage-femme.
Face à cette réalité, les médecins-chefs de district lancent un appel appuyé au ministère de la Santé pour le renforcement des ressources humaines. « Nous voulons que tous les postes de santé soient doublés. Qu’il y ait un infirmier chef de poste et une sage-femme pour prendre en charge la santé des populations. Dans le district de Koumpentoum, nous avons le couplé gagnant, c’est-à-dire un infirmier et une sage-femme, dans 16 postes sur 24 », a déclaré le Dr Siré Sagna. Même son de cloche chez son collègue de Kidira, Dr Saliou Gningue, qui déplore l’absence de sages-femmes dans 10 des 25 postes de santé du district : « Je fais le plaidoyer pour le recrutement de sages-femmes afin de doubler les postes de santé ».
Autre faiblesse structurelle : la précarité du statut des agents de santé. Dans les deux districts, plus de 80 % du personnel est constitué de contractuels recrutés par le ministère de la Santé ou les Comités de développement sanitaire (CDS). À Kidira, aucune sage-femme n’est issue de la fonction publique. « Même la coordinatrice santé de la reproduction du district est contractuelle du ministère de la Santé. Il n’y a pas de sage-femme fonctionnaire dans le district de Kidira, contrairement à celui de Koumpentoum qui totalise cinq sages-femmes fonctionnaires sur 28 », indique le Dr Gningue. Et d’ajouter : « Là également, on fait le plaidoyer pour leur recrutement dans la fonction publique. Au niveau du MSAS, elles le sont ».
Malgré ces contraintes, les deux districts affichent des avancées notables. Les médecins-chefs ont souligné des progrès dans la prise en charge de la santé maternelle et néonatale. Tous les décès recensés ont fait l’objet d’investigations et d’audits. S’y ajoutent des résultats encourageants : un taux de prévalence contraceptive satisfaisant, une couverture en SP3 excédant les 50 %, une diminution des décès maternels par rapport à 2024, ainsi qu’une amélioration des indicateurs nutritionnels et de santé de l’enfant. Des points forts qui témoignent de la résilience des acteurs de santé, bien qu’évoluant dans un système encore fragile
Denise ZAROUR MEDANG
L’article Les districts de Koumpentoum et de Kidira exposent leurs souffrances : accoucher dans la douleur, soigner dans le dénuement est apparu en premier sur Sud Quotidien.