Longtemps perçu comme une économie émergente en quête de stabilité, le Maroc s’impose désormais comme un acteur incontournable et un concurrent direct des grandes puissances méditerranéennes, notamment l’Espagne, dans des secteurs stratégiques comme l’automobile et le tourisme.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes et dessinent le portrait d’une économie en pleine mutation. La croissance de l’économie mondiale devrait ralentir en 2025 et 2026, mais le Maroc semble naviguer à contre-courant de cette tendance globale. Après un premier trimestre 2025 marqué par une progression robuste de 4,8 % en glissement annuel, les économistes tablent sur une croissance soutenue avoisinant 4 % pour l’ensemble de l’année.
Cette performance remarquable trouve ses racines dans la vitalité des secteurs non agricoles, qui affichent une progression de 4,6 %, tandis que l’industrie manufacturière continue sa montée en puissance avec une croissance de 4,5 %. Loin des turbulences qui agitent d’autres économies émergentes, le Maroc présente ce que les analystes de JP Morgan, cités par la presse ibérique, décrivent comme « une économie frontière sans déséquilibres majeurs », un diagnostic qui traduit la confiance croissante des investisseurs internationaux.
Les chiffres de production témoignent de cette ascension fulgurante : plus de 350 000 véhicules ont été assemblés dans le royaume au premier semestre 2025, soit une hausse spectaculaire de 36 % par rapport à l’année précédente. Cette performance place le Maroc dans une position où il pourrait, au rythme actuel, dépasser des pays européens établis comme l’Italie ou la Pologne en termes de volume de production.
Tanger et Kénitra sont devenues les symboles de cette réussite industrielle. Ces villes, transformées en véritables hubs automobiles, attirent des capitaux européens et asiatiques considérables. Le royaume accueille aujourd’hui des projets d’envergure mondiale, à l’image des usines de batteries pour véhicules électriques implantées par des géants chinois comme Gotion High-Tech ou Hunan Zhongke Shinzoom Technology.
Avec plus de 10,4 % du PIB national et plus de 220 000 emplois directs, l’industrie automobile représente désormais plus de 25 % des exportations marocaines. Un poids économique qui fait du secteur un pilier incontournable de la stratégie de développement du pays.
Pilier traditionnel de l’économie marocaine, le tourisme connaît lui aussi une renaissance remarquable. Grâce à l’embellie du tourisme marocain, le secteur de location de voitures a connu une forte croissance en 2024. Les arrivées de visiteurs ont bondi de 16 % au premier semestre 2025, un chiffre qui témoigne de la capacité du royaume à séduire une clientèle internationale de plus en plus diversifiée.
Cette performance prend une dimension particulière quand on la compare aux projections espagnoles. Les prévisions indiquent que pour les mois de mars et avril 2025, les dépenses touristiques dépasseront les 20 milliards d’euros, soit près de 13% de plus qu’à la même période de 2024, selon les autorités ibériques. Si l’Espagne maintient sa position de leader, le Maroc gagne du terrain et s’impose comme une alternative de plus en plus crédible pour les voyageurs européens.
Cette manne touristique contribue directement à l’amélioration de la balance des paiements du royaume, dont le déficit courant a été ramené à seulement 1,1 % du PIB au premier trimestre 2025, un niveau qui traduit la solidité macroéconomique du pays.
La proximité géographique avec l’Europe constitue un avantage concurrentiel majeur. À quelques heures de vol ou de bateau des principales capitales européennes, le Maroc bénéficie d’une accessibilité que ne peuvent revendiquer d’autres destinations émergentes. Cette proximité s’accompagne d’infrastructures logistiques modernes et performantes, fruit d’investissements massifs dans les ports, les aéroports et les réseaux de transport.
L’avantage coût reste également déterminant. Dans un contexte de recherche permanente de compétitivité, les entreprises trouvent au Maroc une combinaison attractive entre coûts maîtrisés et qualité de service. Cette équation économique explique en grande partie l’attrait croissant du royaume pour les investisseurs européens et internationaux.
Les 10 et 11 décembre 2024, la ville de Tanger a accueilli la 10e édition de la Rencontre Entrepreneuriale Hispano-Marocaine dédiée au secteur de l’automobile, un événement qui illustre la reconnaissance croissante du Maroc comme partenaire incontournable de l’industrie automobile européenne. Le chantier du futur plus grand complexe naval d’Afrique, à Casablanca, témoigne de l’ambition marocaine de diversifier son tissu industriel. Ce projet d’envergure vise à positionner le royaume dans les industries maritimes, un secteur où il entend rivaliser avec les chantiers navals européens établis.
Avec les prévisions de croissance de l’industrie automobile marocaine, qui devrait dépasser les 85 milliards d’euros d’exportations annuelles d’ici 2027, selon les analystes espagnols, le Maroc s’apprête à franchir un nouveau cap dans sa montée en puissance industrielle. Ces projections traduisent une réalité : il est probable que l’Espagne et le Maroc intensifient leur relation commerciale, mais aussi qu’ils se livrent concurrence sur le terrain de l’automobile.
Porté par une politique industrielle volontariste et par la confiance renouvelée des investisseurs internationaux, le Maroc redéfinit les équilibres économiques du bassin méditerranéen. Ce qui était impensable il y a encore une décennie devient aujourd’hui une réalité tangible : un pays du Sud qui défie les puissances du Nord sur leurs propres terrains.
Le Maroc d’aujourd’hui n’est plus le partenaire junior des économies européennes. Il s’affirme comme un concurrent solide et crédible, capable de rivaliser avec ses voisins du Nord dans des secteurs stratégiques. Cette mutation profonde redessine la carte économique méditerranéenne et annonce une nouvelle ère de concurrence et d’opportunités dans la région.
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