La transformation numérique bouleverse les économies, les modes de travail et les interactions sociales. Les plateformes, au cœur de ce bouleversement, suscitent à la fois des opportunités d’innovation et des défis en matière de régulation et d’inclusion. Lors de la conférence internationale organisée par le Conseil de la concurrence à Marrakech sur les plateformes numériques, décideurs publics et représentants d’organisations internationales ont partagé leurs visions pour un numérique éthique, compétitif et équitable.
Les plateformes numériques sont devenues des acteurs incontournables de l’économie mondiale. Au Maroc, elles posent des enjeux complexes mêlant innovation, souveraineté, protection des consommateurs et inclusion économique. Face à ces défis, les décideurs publics et les experts internationaux ont abordé des perspectives complémentaires.
Un équilibre entre compétitivité et régulation
Le ministre de l’Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour, a insisté sur le double visage des plateformes numériques. Selon lui, elles représentent des « intermédiaires incontournables » et des « écosystèmes intégrés », porteurs d’innovation et de création de valeur, mais génèrent également des défis en matière de transparence, de sécurité juridique et de protection des consommateurs.
Le ministre a mis en garde contre la « nouvelle forme de concurrence asymétrique » accentuée par l’essor de l’intelligence artificielle et la fragilité de l’emploi qu’elle entraîne. Pour y répondre, le ministère a lancé plusieurs initiatives, dont l’étude nationale sur le commerce électronique et le déploiement des plateformes d’appui « Tijalia » et « MRTB ». Il a également souligné la nécessité de renforcer la souveraineté numérique et de promouvoir une concurrence saine à travers des mesures comme l’ouverture progressive du marché du paiement électronique et la dérégulation du marché de livraison de colis légers.
M. Mezzour a conclu son intervention par dire que la régulation doit être un levier garantissant des marchés justes et transparents, conciliant innovation technologique, compétitivité économique et équité sociale.
Pour un numérique éthique et inclusif
La ministre déléguée chargée de la Transition numérique et de la Réforme de l’administration, Amal El Fallah Seghrouchni, a fait part, de son côté, d’une vision du numérique au service de l’humain. Elle a souligné que les plateformes modifient les chaînes de valeur et posent des questions de confiance, de transparence et de souveraineté numérique.
Dans le cadre de la stratégie « Maroc Digital 2030 », le Royaume s’engage à rendre le numérique accessible à tous, en favorisant l’inclusion et le développement des compétences digitales, a fait savoir la responsable gouvernementale. Des projets structurants sont en cours pour réduire la fracture numérique, notamment l’extension de la fibre optique à 5,6 millions de foyers, la généralisation progressive de la 5G et la couverture de 1.800 localités rurales, afin que les services numériques bénéficient à l’ensemble des citoyens, a-t-elle précisé.
Mme Seghrouchni a également insisté sur la cybersécurité comme « socle de confiance » et sur la souveraineté numérique, illustrée par le projet stratégique du Megadata Center de Dakhla. Selon elle, le développement des plateformes repose sur quatre piliers : infrastructures, régulation, innovation et inclusion.
Concentration des marchés et inclusion mondiale
La directrice à la CNUCED, Luz Maria de la Mora, a mis l’accent quant à elle sur la croissance exponentielle des flux de données et la concentration du marché numérique. Elle a rappelé que huit des dix premières entreprises mondiales sont des géants technologiques dont la valeur boursière cumulée dépasse 19.000 milliards de dollars.
Cette concentration crée des barrières à l’entrée et accentue les fractures mondiales, nécessitant une intensification de la régulation et des législations ex-ante à l’échelle internationale. Mme de la Mora a identifié cinq facteurs essentiels pour garantir l’inclusion des pays en développement : investissement dans les infrastructures, développement des compétences, soutien aux PME innovantes, cadre réglementaire strict et application du droit de la concurrence.
Elle a conclu en soulignant l’importance de la coopération nationale, continentale et internationale pour concevoir des cadres adaptés et permettre une participation équitable à l’économie numérique mondiale.
The post Plateformes numériques : entre innovation et éthique appeared first on Hespress Français - Actualités du Maroc.
