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on - Wed at 11:45 AM -
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Alors que les mutations culturelles et technologiques bouleversent l’accès à l’information, la création d’une Bibliothèque nationale au Sénégal apparaît comme une nécessité stratégique. Entre préservation du patrimoine, démocratisation du savoir et développement de la recherche, le projet soulève à la fois espoirs et interrogations.
Un pays riche en patrimoine, mais dépourvu d’un centre national unique
Le Sénégal, reconnu pour sa diversité culturelle et intellectuelle, conserve aujourd’hui ses archives et documents à travers un réseau dispersé de bibliothèques universitaires, municipales, centres de documentation et institutions spécialisées. Des trésors tels que les manuscrits anciens de Saint-Louis, les archives coloniales de Dakar ou les collections universitaires sont disséminés, souvent mal conservés et difficilement accessibles au grand public.
Pourtant, dans un pays où la mémoire se transmet à la fois par l’oralité et par l’écrit, disposer d’un espace central de conservation et de valorisation est un enjeu majeur. Une Bibliothèque nationale permettrait non seulement de préserver ce patrimoine, mais aussi de l’ouvrir à tous, gratuitement.
Un outil stratégique pour l’éducation et la recherche
Une Bibliothèque nationale, en plus de centraliser le dépôt légal des publications sénégalaises, offrirait un lieu de référence pour étudiants, chercheurs, enseignants et journalistes. Les bénéfices seraient multiples :
La centralisation et le catalogage des œuvres publiées au Sénégal ou portant sur le pays doivent aller de pair avec la numérisation des fonds, afin d’assurer un accès à distance plus large et plus équitable. Cette démarche doit aussi inclure la valorisation des langues nationales à travers les productions en wolof, pulaar, sérère, mandingue ou diola. Enfin, elle suppose un investissement continu dans la formation des professionnels de l’information et de la documentation, pour garantir la qualité et la pérennité du service
Selon le professeur Cheikh Anta Sow, spécialiste en sciences de l’information, « une Bibliothèque nationale n’est pas seulement un bâtiment rempli de livres, c’est un symbole de souveraineté culturelle et un outil de développement intellectuel ».
Un pôle culturel et touristique potentiel
Au-delà de la conservation des documents, la Bibliothèque nationale pourrait devenir un espace vivant.
Des expositions temporaires sur l’histoire du Sénégal, des ateliers de lecture pour enfants, des résidences d’écrivains ou encore des conférences internationales pourraient y être organisés. L’institution jouerait alors un double rôle :
Renforcer la vie culturelle nationale passe par la création d’un espace dédié aux rencontres et aux débats autour des idées et des œuvres. Un tel lieu contribuerait aussi à attirer des visiteurs étrangers désireux de découvrir l’histoire et la richesse de la création littéraire sénégalaise.
Des expériences similaires en Afrique, comme la Bibliothèque nationale de Côte d’Ivoire ou celle du Maroc, montrent qu’une telle structure peut devenir un véritable centre d’animation culturelle et un point fort de l’identité nationale.
Les défis à surmonter
La création d’une Bibliothèque nationale au Sénégal s’accompagnerait inévitablement de plusieurs défis. Le premier est financier : construction, équipement, numérisation et maintenance exigent des investissements lourds, qu’il faudrait couvrir en mobilisant à la fois le budget de l’État, des partenariats publics-privés et le soutien de bailleurs internationaux. Le second enjeu concerne les ressources humaines, car il sera nécessaire de former et de fidéliser des bibliothécaires, archivistes, conservateurs et informaticiens capables de gérer aussi bien des collections physiques que numériques. S’y ajoute la question de la gouvernance : l’institution doit éviter de se transformer en structure élitiste ou trop bureaucratique. Son fonctionnement devrait au contraire reposer sur la transparence, l’inclusion et la gratuité des services. Enfin, pour remplir pleinement sa mission, la bibliothèque devrait garantir l’accessibilité à l’ensemble du territoire, y compris aux zones rurales, grâce à des plateformes numériques adaptées
Perspectives et feuille de route
Pour que ce projet prenne forme, un plan directeur pourrait être élaboré en trois étapes :
La mise sur pied d’une Bibliothèque nationale devrait commencer par un inventaire national des fonds existants et un état des lieux de leur conservation. Il faudrait ensuite créer une structure administrative dédiée pour piloter le projet. Une phase pilote pourrait être engagée, combinant la numérisation prioritaire des documents rares et la construction d’un bâtiment central à Dakar, complété par des antennes régionales. Enfin, des partenariats avec l’UNESCO, l’Union africaine et certaines universités étrangères offriraient à la fois une expertise technique et un appui financier indispensables à la réussite de l’entreprise
Un choix politique et sociétal
La création d’une Bibliothèque nationale au Sénégal dépasse la simple question d’infrastructures. Elle renvoie à une vision de société : celle d’un pays qui investit dans la mémoire, le savoir et la transmission. Dans un contexte où l’information est un levier stratégique de développement, cette institution pourrait devenir un pilier de la souveraineté culturelle sénégalaise et un héritage pour les générations futures.
Comme le résume l’écrivain Boubacar Boris Diop : « Un peuple qui sait où se trouvent ses livres et ses archives sait aussi où se trouvent ses racines. »
Par Samba Niébé BA
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