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Dans le cadre du festival Ciné Fest’Fem, le Musée des Civilisations Noires (MCN) a accueilli une soirée émouvante dédiée à la projection de deux films documentaires : L’arbre sans fruit de la Nigérienne Aïcha Macky et Le collier et la perle du Sénégalais Sellou Diallo. La séance, suivie d’un échange fructueux avec le public, a mis en lumière les violences sociales, physiques et psychologiques subies par les femmes, en particulier autour des questions de maternité, de deuil et de la pression sociale.
Le collier et la perle de Sellou Diallo est né d’un geste d’amour : accompagner son épouse pendant sa grossesse. Mais très vite, le réalisateur y a intégré un hommage plus large, dénonçant les féminicides et rendant visible la charge émotionnelle et physique de la maternité. À travers des images intimistes, il capture la beauté, mais aussi les traces (vergetures, césariennes) que laissent la grossesse et l’accouchement sur le corps des femmes. « J’ai voulu m’approcher de ces corps-là, pour qu’ils me racontent leur histoire », a-t-il expliqué, évoquant son désir de sensibiliser le public à ces souffrances souvent invisibilisées.
De l’autre côté, L’arbre sans fruit plonge dans le drame personnel et collectif de l’infertilité. Aïcha Macky y raconte son propre parcours, marqué par la pression sociale et familiale, mais aussi par le deuil d’une mère morte en couches. Son film explore avec une rare franchise la stigmatisation des femmes sans enfant, une « méchanceté gratuite » qui pousse beaucoup à s’isoler et à perdre confiance en elles. « Votre vie intime devient publique. Tout le monde se permet de vous faire des reproches », a-t-elle témoigné, émue.
Dialogue sans fard avec le public : lever les tabous
La discussion qui a suivi, animée par un public visiblement touché, a permis d’approfondir ces thématiques. Une travailleuse sociale, Diatou Sonko, a salué la convergence des deux œuvres sur « les violences faites aux femmes », soulignant que la pression à enfanter n’est pas seulement le fait des hommes, mais aussi des femmes entre elles. Elle a appelé à une plus grande implication des hommes dans l’accompagnement des grossesses.
Un spectateur nigérien, Idrissa, a reconnu dans le film d’Aïcha des réalités sociales douloureuses, avouant avoir lui-même, enfant, cru aux préjugés sur les femmes sans enfant. Il a interrogé la réalisatrice sur la résilience possible face à ces pressions.
Une question du public a également mis en lumière la singularité des deux démarches. Sellou Diallo, en tant qu’homme et futur père, porte un regard à la fois tendre et politique sur le corps de son épouse et des autres femmes. Aïcha Macky, elle, se met à nu, exposant sa vulnérabilité et son histoire familiale tragique. Interrogée sur le regard des autres après un tel dévoilement, elle a répondu avec une force tranquille, soulignant la nécessité de ces récits pour faire avancer les mentalités.
En clôture, les deux réalisateurs ont insisté sur la dimension mémorielle et transformative de leur travail. « C’est comment habiter autrement ce monde, comment inventer de nouveaux rapports humains », a déclaré Sellou Diallo. Pour Aïcha Macky, son film est un moyen de « combler un vide » et de redonner une voix à celles qui sont réduites au silence.
Cette soirée au MCN a confirmé la puissance du cinéma documentaire pour éveiller les consciences et ouvrir le dialogue sur des sujets tabous. L’arbre sans fruit et Le collier et la perle resteront comme des œuvres essentielles, des hommages vibrants à la force des femmes et des appels urgents à plus de respect et d’empathie.
LAMINE DIEDHIOU
L’article Projection-débat au musée des civilisations noires (MCN) : « L’arbre sans fruit » et « Le collier et la perle », deux films qui brisent les tabous est apparu en premier sur Sud Quotidien.
