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A la 15 août, dans les églises, les places publiques ou au détour des chemins de pèlerinage, des foules se lèvent pour honorer Marie, la mère de Jésus. La fête de l’Assomption, qui célèbre son élévation au ciel, corps et âme, est l’un des temps forts du calendrier liturgique catholique. Derrière la solennité religieuse, au-delà du mystère théologique, elle est aussi l’occasion d’interroger une figure féminine dont l’influence traverse les siècles, les continents et parfois même les confessions.
Pour les croyants qui la célèbre, l’Assomption est la victoire de la fidélité sur la fatalité, une récompense céleste accordée à celle qui a dit oui sans savoir où cela la mènerait. Mais pour beaucoup, au-delà des dogmes, Marie demeure une figure d’humanité lumineuse, une femme debout, silencieuse souvent, mais jamais absente.
Les récits évangéliques, la décrivent jeune fille effacée à Nazareth, mère inquiète à Jérusalem, témoin douloureux au pied de la croix. Marie, dans sa discrétion, traverse la vie de Jésus sans jamais la détourner vers elle. C’est précisément ce retrait qui donne à sa présence une force singulière. Elle n’impose rien, mais elle accompagne, patiente, persévère. Elle est là au début de l’histoire chrétienne, et toujours présente à ses marges, dans les élans populaires, les invocations, les images suspendues dans les maisons.
Dans un monde secoué par les doutes, la violence et l’individualisme, Marie est parfois invoquée comme un dernier recours. Ce n’est pas un hasard si tant de peuples la prient dans leurs langues maternelles, l’associent à leurs douleurs intimes, à leurs deuils, à leurs espoirs de paix ou de fécondité. À chaque époque, Marie se laisse adopter. On la fait noire, métisse, blanche ou dorée. Elle traverse les frontières, épouse les cultures, devient la Madone des bidonvilles comme la Vierge des cathédrales.
L’Assomption, proclamée dogme en 1950 par le pape Pie XII, est donc bien plus qu’une croyance dans l’élévation physique d’un corps. C’est une affirmation spirituelle d’espérance : celle que le destin humain ne s’arrête pas à la tombe, que la dignité d’une vie fidèle peut être honorée jusque dans l’éternité. Marie, élevée au ciel, devient une promesse offerte à tous, une victoire non pas éclatante, mais humble et silencieuse, à l’image de sa vie.
Cette année, le calendrier rapproche l’Assomption et le Magal, offrant un écho singulier entre deux commémorations qui honorent, chacune, une figure de sainteté universelle : la Vierge Marie et le fondateur du mouridisme, Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké, qui sont deux dévotions universelles.
Figure majeure de l’islam soufi en Afrique de l’Ouest, le Cheikh a consacré un poème à Marie, mère de Jésus. Dans cette ode rare et lumineuse, l’auteur du Massalik al-Jinan ne célèbre pas seulement une femme du Livre, mais une figure spirituelle universelle, reconnue et vénérée bien au-delà des clivages religieux.
Dans ce texte empreint de révérence, Bamba évoque Marie avec une dévotion sincère et profonde. Il la nomme « la sainte pure », celle qui fut élue par Dieu parmi toutes les femmes. En poète mystique, il voit en elle le reflet d’une spiritualité élevée, d’une soumission totale à la volonté divine. Pour lui, Marie est un modèle, non de faiblesse, mais de grandeur intérieure. Une grandeur qui transcende les religions du Livre et rejoint l’idéal soufi : la pureté du cœur, la fidélité au Bien-Aimé, le sacrifice silencieux.
En magnifiant Marie, Cheikh Ahmadou Bamba tend un pont subtil entre Christianisme et Islam, mais aussi entre les mystiques de tous horizons. Il rappelle que la sainteté, dans sa vérité la plus nue, n’a pas de frontières. Ce poème, loin d’être une simple louange, devient un acte de reconnaissance. En Marie, Bamba voit non seulement la mère du Prophète Jésus, mais une sœur d’âme, une élue de Dieu, digne d’inspirer les croyants de toutes confessions. Un geste d’une modernité spirituelle saisissante
L’Assomption, n’est pas une échappée hors du monde. C’est une reconnaissance que la vie humaine, si elle est portée par l’amour, la foi, le service, peut être transfigurée. Elle rappelle que la sainteté n’est pas l’apanage des parfaits, mais des disponibles. Et à travers Marie, c’est toute l’humanité qu’on espère élevée. Non pour fuir la terre, mais pour mieux la servir. Elle l’élève, doucement. Et c’est peut-être là son plus grand miracle. « Je vous salue Marie, comblée de grâce »
Henriette Niang Kandé
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