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Depuis plusieurs années, l’université sénégalaise peine à retrouver un fonctionnement normal. Les années académiques s’entremêlent, la recherche s’essouffle, et le monde universitaire semble pris dans une spirale d’irrégularités structurelles. Face à cette crise persistante, Dr Pascal Oudiane, sociologue et enseignant-chercheur à l’université Gaston Berger de Saint-Louis, lance un appel : sauver l’université et la transformer en un levier solide de soutien à l’État et aux demandes sociales.
Chaque année, des milliers de nouveaux bacheliers intègrent les universités publiques. 2025 ne fera pas exception, après la publication des résultats du baccalauréat. Mais malgré cette routine, les retards s’accumulent. Beaucoup de filières n’ont pas encore bouclé leur première année, étirée sur plus d’un an. La recherche tourne au ralenti, les enseignants étant accaparés par les cours, au détriment de l’encadrement et de l’innovation.
Pour Dr Oudiane, la situation actuelle n’est pas nouvelle. « Dès 2016, nous avons dénoncé des insuffisances héritées de l’époque socialiste et aggravées au fil du temps », rappelle-t-il. L’université est minée, selon lui, par un double malaise : celui des infrastructures, devenues obsolètes face à la démographie étudiante, et celui des conditions de vie des étudiants comme du personnel administratif et enseignant.
Le sociologue pointe aussi la qualité de l’enseignement, souvent remise en cause par les citoyens eux-mêmes. Le chômage des diplômés pousse, dit-il, les Sénégalais à interroger la pertinence des formations proposées. Il critique au passage l’idée, jadis évoquée sous le régime de Macky Sall, d’augmenter les frais d’inscription : « Avant de penser à la marchandisation de l’université, il faut d’abord améliorer le pouvoir d’achat des ménages et renforcer l’économie nationale. »
Pour Dr Oudiane, c’est sur l’organisation de la recherche que l’université doit miser. « Une recherche bien structurée peut documenter un enseignement pertinent et répondre efficacement aux attentes sociales de l’État et de la nation », plaide-t-il. À ce titre, il se félicite de la récente décision gouvernementale de recruter 500 enseignants-chercheurs, un effort salué comme une réponse urgente aux nombreux défis de l’université sénégalaise.
Mais pour être efficace, cette mesure doit s’accompagner d’une refonte des méthodes de travail. Il appelle à la constitution d’équipes pluridisciplinaires, réunissant des chercheurs venus de divers horizons académiques pour produire des innovations utiles et durables. « On ne pourra jamais améliorer la qualité si on ne développe pas la pluridisciplinarité. Il faut des laboratoires partagés, où les chercheurs collaborent au lieu de travailler en silos », insiste-t-il.
Citant la norme fixée par l’OCDE en Afrique (un enseignant pour 19 étudiants), Dr Oudiane estime que le recrutement massif est une première étape, mais qu’il faut aller plus loin. « Ces nouveaux PER doivent être les moteurs de l’innovation. Le développement endogène ne peut plus dépendre uniquement de l’endettement public. Il repose aussi sur la capacité à produire localement des solutions », conclut-il.
Pour sortir du marasme, l’université sénégalaise doit donc opérer sa propre révolution intellectuelle : miser sur les hommes, les idées et la coopération. Une urgence que Dr Oudiane résume en deux mots : sauver et transformer.
Denise ZAROUR MEDANG
L’article Dr Pascal Oudiane sur la gestion des universités et le recrutement des enseigneurs-chercheurs : sortir du tunnel par l’innovation et la pluridisciplinarité est apparu en premier sur Sud Quotidien.