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Du 18 au 20 juin, à l’initiative du Think tank panafricain AfrikaJom Center dirigé par Alioune Tine, une conférence régionale s’est ouverte à Dakar sous un intitulé sans ambiguïté : « Changer ou périr ». Le mot d’ordre sonne comme une sommation adressée à une organisation qui, malgré ses ambitions initiales, peine aujourd’hui à justifier son rôle auprès des citoyens ouest-africains.
Cinquante ans après sa création, l’organisation régionale ouest-africaine est en effet en proie à une crise de légitimité et de fonctionnement. Réduite à douze États membres, contestée notamment par une frange de plus en plus importante de ses jeunesses, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui était naguère constituée de 15 Etats traverse sans nul doute la crise la plus profonde de son histoire.
C’est ainsi que la journée d’ouverture de la conférence régionale a donné lieu à une série de constats sans concessions sur l’état de la CEDEAO, perçue comme une institution minée par des contradictions internes et une gouvernance verticale. Il a été relevé la concentration du pouvoir entre les mains de la Conférence des chefs d’État et de Gouvernement, au détriment des préoccupations citoyennes.
Il a été souligné que la CEDEAO fait montre de célérité et de fermeté face aux putschs militaires, comme en témoignent les sanctions économiques sous forme d’embargos imposés au Mali et au Niger. Et que par contre, elle se montre étonnamment silencieuse face aux dérives constitutionnelles de certains dirigeants qui s’accrochent au pouvoir au mépris de l’État de droit en tripatouillant la constitution à travers notamment la tentation du 3ème mandat ou plus grave encore de la présidence à vie. Cette gestion à deux vitesses des crises politiques qui secouent nombre de pays de la sous-région nourrit, selon plusieurs participants, un profond ressentiment des populations et une défiance croissante à l’égard de l’institution régionale.
Trois panels, une urgence partagée
Trois thématiques majeures ont structuré les débats de la première journée. Concernant la Souveraineté numérique, les intervenants ont insisté sur la nécessité pour l’Afrique de l’Ouest de se doter d’une stratégie numérique autonome, passant par la maîtrise des infrastructures, des données, et la formation de compétences locales. Ainsi a-t-il été rappelé l’injonction de Cheikh Anta Diop : « Armez-vous de science jusqu’aux dents ». Dans son prolongement, il a été rappelé que : « A compétence égale, seule la vérité triomphe »
Concernant l’intégration économique et monétaire, Mme Aminata Touré, a fait remarquer que le commerce intra-régional reste marginal, autour de 12 %. Un chiffre qui témoigne de la faiblesse structurelle de l’intégration économique au sein de la CEDEAO et qui gagnerait à être revu en hausse. Les discussions sur la future monnaie unique ont rappelé que les enjeux monétaires sont éminemment politiques, et que leur aboutissement dépendra d’une volonté collective encore vacillante. Pour la sécurité régionale, face à l’intensification des menaces jihadistes et de la criminalité transfrontalière, il a été question d’une mutualisation accrue des moyens de défense et une inévitable coopération avec l’Alliance des Etats du Sahel (AES).
Si les critiques n’ont pas manqué, la conférence n’a pas, pour autant versé dans un procès à charge.
Au contraire plusieurs voix ont souligné les acquis de la CEDEAO, notamment en matière de libre circulation des personnes, rendue possible par l’usage de passeports ou cartes d’identité communautaires. La réalité de cette intégration humaine, incarnée par des flux économiques informels, à l’image des tailleurs sénégalais qui exportent leurs créations sur le marché du Nigéria, Ghana, Libéria par exemple. Ce qui rappelle l’existence d’un socle tangible sur lequel bâtir. Ce qui a fait dire au Pr Abdoulaye Bathily que « les peuples veulent plus de CEDEAO, une meilleure CEDEAO, mais certainement pas moins de CEDEAO ». Encore faut-il que l’organisation en prenne une pleine conscience et se montre à la hauteur de cette exigence démocratique.
À l’issue de cette première journée il s’est dégagé l’idée selon laquelle, la CEDEAO ne peut plus continuer sur sa trajectoire actuelle. Elle doit être repensée, renforcée, démocratisée. Ses mécanismes de décision doivent gagner en transparence ; ses textes, être appliqués avec rigueur et cohérence ; son lien avec les peuples, être rétabli.
Ndeye Aminata CISSE
L’article Conférence régionale sur le cinquantenaire de la Cedeao : l’urgence de la refondation est apparu en premier sur Sud Quotidien.